Boulangerie Chami, une institution de Brive
Publié le 1 octobre 2024
« Lorsque nous sommes en escale, nous avons souvent des missions de représentation avec le corps diplomatique et les ambassades locales. Le commandant convie à bord les autorités du pays et des invités de marque. Nous réalisons à cette occasion des cocktails et parfois des pâtisseries de restaurant à l’assiette, ce qui nous permet d’exprimer pleinement notre savoir-faire », témoigne John N., boulanger embarqué dans la Marine Nationale.
En tous temps et en tous lieux, les bons repas sont essentiels pour soutenir le moral des troupes. La Marine Nationale applique cette règle à la lettre et chacun de ses navires est équipé de son propre fournil, souvent intégré à la cuisine de bord. John N. (1) est boulanger pâtissier à bord du Monge, un bâtiment d’essais et de mesures de 230 mètres de long unique en son genre, qui compte de 200 à 220 personnels embarqués. Mais avant d’intégrer la Marine Nationale, le boulanger de 29 ans a pris le temps de bien se former. « C’est mon père cuisinier qui m’a encouragé dans cette voie. J’ai débuté en fin de troisième par un CAP de boulanger à l’école Grégoire Ferrandi, en alternance avec l’hôtel Ritz de Paris. J’ai enchainé avec un CAP connexe en Pâtisserie chez Dalloyau, au laboratoire de Colombes », raconte John. À 21 ans, le jeune artisan devient chef boulanger dans un commerce de l’avenue de Versailles à Paris, mais il pense déjà à rejoindre la Marine. « J’ai trouvé un poste de jour chez M. Dos Santos à Saint-Cloud et j’ai effectué une bonne remise à niveaux pour préparer les épreuves de sélection au centre de recrutement de Vincennes », se souvient-il.
Du Ritz à la Marine Nationale
« L’uniforme, servir mon pays, c’est important pour moi », indique le boulanger. En juillet 2012, John N. apprend qu’il va intégrer l’École des Fourriers de Querqueville pour 9 semaines, au terme desquelles, il signe son premier contrat avec la Marine. Aujourd’hui à bord du Monge, le boulanger dispose du même matériel qu’un terrien : pétrin à bras oblique, refroidisseur d’eau, chambre de pousse, façonneuse et deux fours ventilés, le tout solidement arrimé au sol pour pouvoir faire face à une mer démontée. « Le boulanger de marine ne produit du pain qu’une fois en mer pour des missions de 24h, une semaine ou même 3 mois et demi avec escale. Le reste du temps, même s’il peut produire de la pâtisserie, le marin s’entraine militairement et c’est le Commissariat des Armées (2) qui ravitaille en pain l’équipage du bâtiment à quai », précise John.
Trois fournées par jour
Sur une journée type, le boulanger, qui se lève à 5 h du matin et travaille seul, cuit trois fournées pour disposer dès 7h du matin et jusqu’à 20h de pain frais pour un effectif variable selon le nombre d’hommes de quart. « Outre le pain courant, je fabrique beaucoup de pains spéciaux : complet, tomates basilic, moutarde à l’ancienne, estragon, poivrons curry, pain aux lardons. Le jeudi, jour de repas amélioré (une tradition dans la Marine), je propose un pain noix raisins pour accompagner les plateaux de fromages », détaille l’artisan.
Côté pâtisserie, une gamme boulangère, qui va de la tarte citron au millefeuille en passant par l’éclair pina colada ou la religieuse irish coffee, permet d’approvisionner la cafétéria et les carrés des officiers et sous-officiers du navire. « Je fais également des entremets mousse framboise passion ou trois chocolats dans des grands cadres 40X60, des brioches, des kouglofs et des panettone. Finalement on arrive à reproduire ce qu’on l’on fabrique dans une boulangerie classique, avec les contraintes de travailler pour un collectivité. Cela complique un peu les choses, mais dans la Marine, on sait s’adapter », observe le boulanger, qui donne même un coup de main en cuisine entre deux fournées. Tous les trois ans, les marins changent d’affectation et de bâtiments. À peine arrivé sur le Monge, John envisage déjà de virer de bord pour rejoindre les forces sous-marines. « Même dans les submersibles, on fabrique du pain ! Il faudra que je pose une demande, car je vise les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins. »
Texte et photo : Frédéric Vielcanet
(1) Pour des raisons de sécurité et de confidentialité, la Marine Nationale ne souhaite pas divulguer le nom de famille de ses marins.
(2) Le Commissariat aux Armées fournit notamment les denrées et la farine T55 (Grands Moulins de Paris) pour un stock minimum de 40 jours de vivres quand la bâtiment prend la mer.
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